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Ecrire ma bio par Joshin Sensei

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Ecrire ma bio ?

Hier 34 ans, premier zazen : ennui, ennui… puis sans savoir pourquoi, deuxième zazen et de là : Japon, monastère, rencontre avec le Maître, crâne rasé, robes noires.

Ne rien comprendre, zazen, apprendre, verser le thé, cuire le riz, zazen.
Bol à aumônes, marcher dans les villages, chanter, attendre, repartir, chanter.

Eté si chauds, hivers si froids, zazen.

Ecrire ma bio ?

J’offre ma gratitude au rire du Maître devant mes erreurs, ma confusion, mon ignorance

J’offre ma gratitude au courage du Maître, à sa patience, à son dévouement, continuant à enseigner à tous les êtres à travers toutes les circonstances

J’offre ma gratitude aux grands pins qui entourent le temple, à leur chant, à leur éclat lorsqu’ils resplendissent de milliers de gouttes de pluie

J’offre ma gratitude à l’écho des pas du Maître résonnant dans la salle de méditation, nous encourageant, nous accompagnant dans notre nuit

J’offre ma gratitude au parfum des tatamis, à la douceur des murs en bois, à la couleur fanée des tissus de l’autel

J’offre ma gratitude à la beauté qui m’a ouvert les yeux sur le monde

J’offre ma gratitude à l’écho des paroles du Maître qui chuchote dans mon cœur me montrant encore et encore le Chemin de la compassion

J’offre ma gratitude à tous ceux et celles au fil de toute ma vie qui m’ont permis de franchir un jour le seuil du temple de Zuigakuin

J’offre ma gratitude à tous ceux et celles qui m’y ont reçue

J’offre ma gratitude totale au Maître qui m’a permis de commencer à comprendre la gratitude.

 

 

 

 

 

Il dit : «  Redonner ». Retour vers la France bon gré, mal gré. Chercher une vieille maison, peu d’argent, aller vers les montagnes.

Espace, monts arrondis, sapins, neige : beauté

La Demeure sans Limites : volige et marteau, brouette et ciment, poêle et bûches, froid. Seule, solitude, zazen, zazen, zazen.

Printemps : carottes à éclaircir, Shobogenzo «  Montagnes et rivières sont exactement maintenant l’actualisation de la Voie du Bouddha » , calligraphie : DÔ la Voie,  Nikayas, « Ainsi ai-je entendu », tomates vertes et marguerites pour des bouquets sur l’autel. Zazen.

Petit à petit, un partage, des visites, un temple qui prend forme, ni japonais, ni occidental, juste ce qui est là. Bols en bois, cuillères, pommes de terre, riz, soutras en français.
« Aussi innombrables que soient les êtres vivants, je fais vœu de les sauver tous… »
Zazen.

Therigata « Je m’inclinai devant lui humblement : «  Viens Baddha, me dit-il… »…

Impermanence, maladie, apprendre zazen allongée, corps douloureux, cancer, salles d’attente, hôpitaux, ré-apprendre zazen.
«  Le véritable corps humain est l’univers entier dans les dix directions ».

Avec mes soeurs
si proches
du présent au passé

nées du Vide
comme moi
un instant pour s’émerveiller
dans la Voie

soeurs
avec moi
entre naissance et mort
sans naissance
sans mort

soeurs du kesa de l’encens
et du silence
avec mes soeurs
de quoi pourrais-je avoir peur?

Le grand silence de l’aube.
Une goutte de rosée suspendue à chaque brin d’herbe.
Le temple s’ouvre de plus en plus : joie du Dharma.
Une disciple, crâne rasé, robes noires.
Des voisins, venez donc boire un café, hospitalité.
Des commerçants, un village : sourires.
Rencontres, amitiés, zazen, rentrer le bois, heure du thé, petits gâteaux, nettoyage.

La disciple devient Sensei. Regard neuf sur le temple.
Une autre disciple arrive.
La Voie du Bouddha, sans début, sans fin.

Demain 70 ans.
Zazen.

Quelle chance, une vie dans le Dharma ! Quelle chance !

Ecrire ma bio ?

Dans ce que j’appelle « moi »
quand la part qui appartient à la terre
reviendra à la terre,
qu’elle enfouisse aussi
toutes mes pensées tristes,
et mon découragement;
qu’elle me donne sa force.

Dans ce que j’appelle « moi »,
quand la part qui appartient à l’eau
retournera vers l’eau,
qu’elle lave ma soif,
mon avidité
pour tout ce qui brille,
mon regard qui toujours cherche;
qu’elle me donne sa fraîcheur.

Dans ce que j’appelle « moi »,
quand la part qui appartient à l’air
retournera à l’air,
qu’il m’emporte des ténèbres
vers la joie,
de la douleur
à l’infini du silence;
qu’il me donne sa légèreté .

Dans ce que j’appelle « moi »,
quand la part qui appartient au feu
retournera au feu,
qu’il purifie la colère qui ronge,
le cri qui dévore,
la tristesse qui enferme;
qu’il me donne la délivrance.

Alors,
cette promeneuse de corps en corps,
cette vagabonde d’utérus en utérus,
de vie en vie,
en une errance sans fin-
pourra enfin
poser ce sac de peau
et entrer
dans la lumière.

 

Joshin  Ni, nonne bouddhiste.

Voir Le site Montagnes et forêts du zen  et aussi Nous asseoir ensemble

Voir La Demeure sans limites

Voir Quand une personne est vraiment vivante par Joshin Sensei