Spécial compassion du n° 20 – dix ans de présence sur le net
L’histoire humaine est une histoire d’amour, de rédemption, de bonté et de générosité. C’est également une histoire de violence, de division, de négligence et de cruauté. Face à tout cela, nous pouvons nous adoucir, tendre la main et faire tout ce qui est en notre pouvoir pour alléger la souffrance. Ou nous pouvons choisir de vivre dans la peur et le déni – faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que nos cœurs ne soient pas atteints, ayant peur de couler dans cet océan de tristesse.
Encore et encore, il nous faut apprendre l’une des leçons de vie les plus éclatantes : que le fait de fuir la souffrance – durcir nos cœurs, nous détourner de la douleur – revient à renier la vie et vivre dans la peur. Donc, bien qu’il soit difficile d’ouvrir nos cœurs envers la souffrance, c’est pourtant la voie la plus directe vers la transformation et la libération.
Compassion et sagesse sont au cœur de la voie du Bouddha. Dans les premières histoires bouddhistes, nous trouvons des jeunes femmes et des jeunes hommes se poser les mêmes questions que nous nous posons aujourd’hui : Comment répondre à la souffrance intriquée dans la vie quotidienne ? Comment pouvons-nous trouver un cœur véritablement délivré de la peur, de la colère et de l’aliénation? Existe-t-il une méthode permettant de découvrir une profondeur de sagesse et de compassion qui pourrait véritablement faire une différence dans ce monde confus et destructif ?
Nous pourrions être tentés de voir la compassion comme un sentiment, une réponse émotionnelle dont nous faisons occasionnellement l’expérience lorsque nous sommes touchés par une douleur subite. Dans ces moments d’ouverture, les couches de nos défenses s’effritent; intuitivement nous ressentons une immédiateté de réponse et nous entrevoyons le pouvoir de la non-séparation. Milarepa, un grand sage Tibétain, exprime ceci lorsqu’il dit, « Comme je tends instinctivement la main pour toucher et apaiser une blessure à ma jambe en tant que partie de mon corps, de la même manière je tends la main pour toucher et apaiser la peine d’un autre comme un élément de ce corps. » Trop souvent ces moments de profonde compassion s’effacent et, une fois de plus, nous nous retrouvons à nous protéger, nous défendre et prendre nos distances par rapport à la peine. Pourtant ce sont des visions furtives qui nous encouragent à remettre en cause le fait que la compassion pourrait être quelque chose de plus qu’un accident.
Peu importe nos efforts, nous ne pouvons pas nous forcer à éprouver de la compassion. Mais nous pouvons tourner nos cœurs vers la compassion. Dans l’une des histoires précoce de la littérature bouddhiste, l’ascète Sumedha réfléchit sur l’immensité du voyage intérieur nécessaire pour découvrir la sagesse et la compassion immuables. Il décrit la compassion comme une tapisserie tissée avec de nombreux fils: générosité, vertu, renonciation, sagesse, énergie, patience, vérité, détermination, amour bienveillant et équanimité. Lorsque nous embrassons tous ces aspects dans nos vies, nous développons le genre de compassion qui a le pouvoir d’apaiser la souffrance.
Il y a quelques années, un moine âge est arrivé en Inde après s’être échappé d’une prison au Tibet. Lors d’une rencontre avec le Dalaï-Lama, il a raconté ses années de prison, le labeur et les coups qu’il avait endurés, la faim et la solitude dans lesquelles il avait vécu et les tortures qu’il avait supportées.
À un moment, le Dalaï-Lama lui a demandé, « Y a-t-il eu un moment où vous avez senti que votre vie était véritablement en danger ? »
Le vieux moine a répondu, « En vérité, la seule fois où j’ai eu vraiment peur est quand j’ai eu peur de ne plus ressentir de compassion pour mes geôliers. »
À entendre de telles histoires, nous nous sentons souvent sceptiques et déroutés. Nous pourrions être tentés d’idéaliser aussi bien ceux qui sont compatissants que la qualité de la compassion elle-même. Nous imaginons que ces gens sont des saints, possédant des pouvoirs qui nous sont inaccessibles. Pourtant les histoires de grande souffrance sont souvent des histoires de gens ordinaires qui ont trouvé une grandeur du cœur. Pour découvrir un cœur éveillé en nous-mêmes, il est crucial de ne pas idéaliser ou romancer la compassion. Notre compassion croît simplement sur la base de notre volonté à faire face à la douleur plutôt que de la fuir.
Peut-être ne nous trouverons-nous jamais dans des situations si périlleuses que notre vie serait mise en danger ; et pourtant l’angoisse et la douleur sont des aspects indéniables de nos vies. Aucun d’entre nous ne peut élever des murs autour de son cœur le rendant invulnérable aux coups de la vie. Lorsque nous sommes confrontés au chagrin dans la vie, nous avons le choix : Nos cœurs peuvent se refermer, nos esprits reculer, nos corps se contracter et nous pouvons faire l’expérience d’un cœur qui vit dans un état de refus douloureux. Nous pouvons aussi plonger profondément en notre for intérieur pour nourrir le courage, l’équilibre, la patience et la sagesse qui nous permettent d’être à l’écoute.
Si nous agissons ainsi, nous allons comprendre que la compassion n’est pas un état. C’est une manière de s’engager dans ce monde fragile et imprévisible. Son domaine n’est pas uniquement le monde de ceux que vous aimez et qui vous sont précieux, mais également le monde de ceux qui nous menacent, nous dérangent et nous causent des soucis. C’est le monde des êtres innombrables que nous ne rencontrons jamais et qui sont confrontés à une vie insupportable. Le voyage ultime d’un être humain consiste à découvrir toute la capacité d’absorption de nos cœurs. Nos capacités à faire souffrir ainsi qu’à apaiser la souffrance vivent côte à côte en nous. Si nous choisissons de développer la capacité à apaiser, ce qui est un défi pour chaque être humain, nous allons découvrir que nos cœurs peuvent beaucoup embrasser, et nous pouvons apprendre à apaiser – plutôt qu’à augmenter- les divisions qui nous séparent les uns des autres.
Durant le premier siècle au nord de l’Inde, probablement dans une région qui fait maintenant partie de l’Afghanistan, a été composé le Sutra du Lotus. L’un des plus importants textes de la tradition Bouddhiste, c’est la célébration du cœur libéré s’exprimant lui-même dans une compassion puissante et illimitée, pénétrant tous les coins de l‘univers, soulageant la souffrance où qu’elle se trouve.
Lorsque le sutra du Lotus a été traduit en chinois, Kuan Yin, « celle qui entend les pleurs du monde » a émergé comme la personnification de la compassion et elle occupe depuis lors une place centrale dans les enseignements et la pratique Bouddhiste. Au cours de siècles, Kuan Yin a été représenté sous toute une variété de formes. Elle est parfois représentée comme une présence féminine, visage serein, bras étendus et yeux ouverts. D’autres fois elle tient une baguette de saule, symbolisant sa résilience – capable de plier sous les plus terribles tempêtes sans se casser. Elle est également représentée avec un millier de bras et de mains, chacun avec un œil ouvert au centre, symbole de sa conscience permanente de l’angoisse et de sa capacité à embrasser et répondre à tous les besoins. Elle prend parfois l’apparence d’un guerrier lourdement armé, personnifiant l’aspect féroce de la compassion engagée à déraciner les causes de la souffrance. Protectrice et gardienne, elle est totalement engagée dans la vie.
Cultiver la volonté d’entendre profondément la souffrance quel que soit l’endroit où nous la rencontrons est le premier pas sur le chemin de la compassion. Notre capacité d’écoute marche sur les talons de cette volonté. Nous faisons des efforts héroïques dans nos vie pour nous protéger de l’angoisse qui nous entoure et vit en nous, mais en vérité, une vie d’évitement et de défense est une vie d’anxiété et de douloureuse séparation.
La véritable compassion ne se forge pas à distance de la douleur, mais dans son feu. Nous n’avons pas toujours une solution à la souffrance. Nous ne pouvons pas toujours apaiser la douleur. Cependant, nous pouvons trouver l’engagement de rester connecté et d’écouter profondément. La compassion n’exige pas toujours des actes héroïques ou des mots pompeux. Dans les périodes de sombre détresse, ce qui est le plus nécessaire est la présence courageuse d’une personne qui écoutera de tout son cœur.
Il peut nous sembler qu’être conscient et ouvrir nos cœurs au chagrin va nous faire souffrir encore plus. Il est vrai que cette ouverture va apporter plus de sensibilité à nos mondes internes et externes. La conscience ouvre nos cœurs et nos esprits à un monde de douleur et de détresse qui auparavant ne faisait qu’effleurer la surface de notre conscience, comme un galet ricochant sur l’eau. Mais la conscience nous enseigne également à lire entre les lignes et à voir au-delà du monde des apparences. Nous commençons à sentir la solitude, le besoin et la peur chez les autres, ce qui nous était auparavant imperceptible. Au-delà des mots de colère, de blâme et d’agitation, nous entendons la fragilité du cœur d’une autre personne. La conscience se fait plus profonde car nous entendons pleinement les pleurs du monde. Chacun de ces pleurs porte l’empreinte de la supplique d’être entendu.
La conscience naît de l’intimité. Nous pouvons seulement craindre et détester ce que nous ne comprenons pas et ce que nous percevons à distance. Compassion et liberté ne peuvent se trouver que dans l’intimité. Nous pouvons avoir peur de l’intimité avec la douleur car nous avons peur de l’impuissance ; nous avons peur de ne pas disposer de l’équilibre intérieur permettant d’embrasser la souffrance sans être dépassé. Et pourtant, à chaque fois que nous trouvons la volonté de rencontrer la détresse, nous découvrons que nous ne sommes pas sans ressources. La conscience nous sauve de l’impuissance, nous enseignant à être utiles à travers notre gentillesse, notre patience, notre résilience et notre courage. La conscience est le précurseur de la compréhension et la compréhension est le prérequis pour mettre un terme à la souffrance.
Shantideva, un maître profondément compassionné qui enseignait en Inde au huitième siècle a dit, « Quoi que vous fassiez, soyez conscients de votre état d’esprit. Faites le bien ; ceci est la voie de la compassion. » Que seraient nos vies si nous suivions cet engagement dans chacune de nos rencontres? Qu’en serait-il si nous nous demandions quelle est notre mission lorsque nous rencontrons une personne sans domicile dans la rue, un enfant en larmes, une personne avec laquelle nous avons des difficultés depuis longtemps ou quelqu’un qui nous a déçu? Nous ne pouvons pas toujours changer le cœur ou la vie d’une autre personne, mais nous pouvons toujours veiller à notre propre état d’esprit. Pouvons-nous abandonner la résistance, les jugements et la crainte ? Pouvons-nous écouter de tout cœur pour comprendre le monde d’un autre personne ? Pouvons-nous trouver le courage de rester présent lorsque nous souhaitons fuir ? Pouvons-nous également trouver la compassion pour nous pardonner de vouloir nous déconnecter ? La compassion est un voyage. Chaque pas, chaque instant de développement est un geste de profonde sagesse.
Ayant vécu en Asie pendant plusieurs années, j’ai rencontré un flot ininterrompu de personnes mendiant dans les rues. Face à un enfant abandonné, émacié je me surprenais à juger une société qui ne pouvait pas s’occuper de ses enfants démunis. Parfois je me sentais en colère, je faisais peut-être tomber quelques pièces de monnaies dans la main de l’enfant tout en ayant soin de garder mes distances. Je débattais avec moi-même pour savoir si je me contentais de perpétuer la culture de la mendicité en répondant à la demande de l’enfant. Cela m’a pris longtemps avant de comprendre que, même si mes pièces étaient appréciées, elles étaient secondaires par rapport au fait qu’il était très rare que j’établisse une connexion avec l’enfant.
Comme l’indique l’étymologie du mot, « compassion » est la capacité à « sentir avec », et cela implique un acte d’empathie et une volonté à dépasser les limites de notre propre expérience et de nos jugements. Qu’est-ce que cela signifierait de me placer dans le cœur de cet enfant mendiant? Qu’est-ce que ça ferait de ne jamais savoir si je vais manger aujourd’hui, dépendant entièrement de ce que me donnent des étrangers ? Voyager par-delà nos limites habituelles, nos cœurs peuvent trembler ; ensuite alors nous avons la possibilité d’accomplir le bien.
Milarepa a dit un jour, « Étant depuis longtemps accoutumé à contempler la compassion, j’ai oublié toute différence entre moi et l’autre. » La véritable compassion ne connaît ni limites ni hiérarchies. Même le chagrin le plus infime mérite la compassion, autant que la plus terrible angoisse. La souffrance d’un cœur brisé suite à une traîtrise requiert autant de compassion que pour une personne emportée au milieu d’une tragédie. Ceux que nous aimons et ceux que nous dédaignons requièrent notre compassion ; ceux qui sont irréprochables et ceux qui sont cause de souffrance sont tous reliés dans la tapisserie de la compassion. Un vieux moine Zen a proclamé un jour, « Oh, si seulement mes robes de moine pouvaient être suffisamment grandes pour envelopper toute la souffrance dans ce monde flottant. » La compassion est la réponse du cœur libéré à la douleur où qu’elle se trouve.
Lorsque nous voyons souffrir ceux que nous aimons, notre compassion est instinctive. Notre cœur peut être brisé. Il peut également être brisé et ouvert. Nous sommes le plus cruellement testés lorsque nous faisons face à la peine de ceux que nous aimons sans pouvoir y remédier. Nous nous efforçons de protéger ceux que nous aimons de la douleur, mais la vie continue à nous enseigner que notre pouvoir a des limites. La sagesse nous enseigne qu’insister sur le fait que l’impermanence et la fragilité ne devraient pas toucher ceux que nous aimons revient à tomber dans l’ennemi proche de la compassion, qui est l’attachement au résultat, et le souhait que la vie soit autre chose que ce qu’elle est réellement.
La compassion signifie offrir un refuge à ceux qui n’ont pas de refuge. Le refuge naît de notre volonté de supporter ce qui parfois semble insupportable – voir une personne aimée souffrir. Lâcher notre insistance à vouloir que ceux que nous aimons ne doivent pas souffrir n’est pas renoncer à l’amour, mais se libérer de l’illusion – l’illusion que l’amour pourrait protéger quiconque des rythmes naturels de la vie. Face à la douleur d’un être aimé, il nous est demandé de comprendre ce que signifie être inébranlable et patient au milieu de notre propre peur. Dans nos relations les plus intimes, l’amour et la peur grandissent simultanément. Un cœur empli de compassion sait que c’est la vérité et n’exige pas que la peur disparaisse. Il sait que c’est seulement au milieu de la peur que nous pouvons commencer à découvrir l’intrépidité de la compassion.
Certaines personnes, ayant une longue histoire de manque d’estime de soi ou de déni trouvent vraiment difficile d’étendre la compassion envers elles-mêmes. Conscientes de l’étendue de la souffrance du monde, elles peuvent avoir le sentiment que c’est de l’auto-complaisance que de s’occuper de leur corps douloureux, de leur cœur brisé ou de leur esprit confus. CPourtant, cela aussi c’est de la souffrance et la véritable compassion ne fait pas de distinction entre soi et les autres. Si nous ne savons pas comment embrasser notre propre fragilité et imperfections, comment pouvons-nous imaginer de trouver de l’espace dans notre cœur pour qui que ce soit d’autre ?
Le Bouddha a dit un jour que vous pourriez chercher partout dans le monde et ne pas trouver quelqu’un méritant plus votre amour et votre compassion que vous-même. Au lieu de cela, trop de gens portent des jugements sévères envers eux-mêmes et s’imposent des exigences qu’ils ne rêveraient jamais d’imposer aux autres, sachant la souffrance qui en découlerait. Ils sont prêts à se faire ce qu’ils ne feraient pas aux autres.
À la poursuite d’une compassion idéalisée, de nombreuses personnes peuvent se négliger elles-mêmes. La compassion « écoute les pleurs du monde, » et nous faisons partie de ce monde. La voie de la compassion ne nous demande pas de nous sacrifier sur l’autel d’un état idéalisé de perfection. Une voie de guérison ne fait aucune distinction : au sein du chagrin de nos propres frustrations, déception, peurs et amertume, nous apprenons des leçons de patience, d’acceptation, de générosité et, ultimement, de compassion.
La compassion la plus profonde est nourrie au sein de la plus profonde souffrance. Face aux batailles de ceux que nous aimons ou qui sont innocents en ce monde, la compassion émerge instinctivement. Face aux gens qui infligent de la peine aux autres, nous devons plonger profondément en nous-mêmes pour trouver la fermeté et la compréhension qui nous permettent de rester ouverts. Se connecter à ceux qui perpétuent le mal est une pratique difficile, malgré tout, la compassion est en quelque sorte superficielle si elle se détourne de ceux qui – perdus dans l’ignorance, la rage et la peur – font du mal aux autres. La montagne de souffrance dans le monde ne diminuera jamais en lui rajoutant encore plus d’amertume, de ressentiment, de rage et de blâme.
Thich Nhat Hanh, l’enseignant Vietnamien bien-aimé a dit, « la colère et la haine sont les fondements de l’enfer. » Cela ne veut pas dire qu’un cœur compatissant ne ressentira jamais la colère. Face à une terrible injustice, à l’oppression et à la violence dans notre monde nos cœurs tremblent, pas uniquement de compassion, mais aussi de colère. Une personne sans colère pourrait être une personne qui n’a pas été profondément touchée par des actes nuisibles qui laissent des cicatrices dans la vie de trop de gens. La colère peut être le début de l’abandon ou le début d’un engagement à aider les autres.
La souffrance peut nous faire brutalement basculer dans la vigilance, et cette vigilance peut devenir l’étoffe de notre propre rage ou l’étoffe de l’action sage et compatissante. Si nous allons vers la haine, nous nous plaçons dans la même position que les personnes qui causent le mal. Nous pouvons également nous mettre en phase avec l’engagement de mettre fin aux causes de la souffrance. Il est aisé d’oublié la représentation de Kuan Yin sous la forme d’un guerrier armé, profondément dédié à protéger tous les êtres, intrépide et résolu à mettre fin à la souffrance.
Il est rare que les mots et les actes d’apaisement et de réconciliation trouvent leur source dans un cœur agité. L’un des grands arts du développement de la compassion consiste à se demander si nous pouvons embrasser la colère sans blâme. Le blâme agite nos cœurs, les maintient contractés et, ultimement, mène au désespoir. Abandonner le blâme revient à maintenir la sagesse discriminatoire qui sait clairement ce qu’est la souffrance et quelle en est la cause. Abandonner le blâme consiste à abandonner la séparation qui rend la compassion impossible.
La compassion n’est pas un instrument magique capable de dissiper instantanément toute souffrance. La voie de la compassion est altruiste, mais pas idéaliste. En s’engageant sur cette voie, il ne nous est pas demandé de renoncer à notre vie, de trouver une solution à tous les conflits de ce monde ou de secourir immédiatement tous les êtres. Il nous est demandé d’explorer comment nous pouvons transformer notre cœur et notre esprit en ce moment même. Pouvons-nous comprendre la transparence de la division et de la séparation ? Pouvons-nous libérer nos cœurs de la mauvaise volonté, de la crainte et de la cruauté ? Pouvons-nous trouver la fermeté, la patience, la générosité et l’engagement de n’abandonner ni rien ni personne dans ce monde ? Pouvons-nous apprendre à écouter profondément et à découvrir le cœur qui tremble face à la souffrance ?
La voie de la compassion se cultive un pas et un moment à la fois. Chacun de ces pas fait rapetisser la montagne de chagrin du monde.
Christina Feldman est l’auteure de « Compassion: Listening to the Cries of the World » (Compassion : Écouter les pleurs du monde) (Rodmell Press). Elle est la cofondatrice et l’une des enseignantes de Gaia House, un centre de méditation Bouddhiste dans le Devon, Angleterre et l’une des enseignantes senior de la Insight Meditation Society à Barre, Massachusetts, USA.
Source Shambhala Sun, Mai 2006 – traduction Bouddhisme au féminin.