Suis-je mon corps ?
C’est une journée lourde, nuageuse et humide. Quand vous marchez dans les prés, vous avez l’impression que l’humidité pénètre vos chaussures et vos chaussettes – vos orteils vous semblent mouillés et froids. Les perles translucides d’humidité font miroiter les brins d’herbes. Ces pâturages ! Je ne me lasse jamais de les admirer, les couleurs, les formes et les gracieux mouvements au gré du vent.
Aujourd’hui je suis descendue dans la prairie du bas, les tiges étaient chargées de graines jaunes. Certaines étaient si hautes qu’elles touchaient les nuages ! Je n’ai pas pu aller très loin parce que j’avais très mal aux pieds – j’ai dû clopiner le long du chemin fauché en me sentant un peu bête. Je dis ça pour que vous n’ayez pas à me demander, « quel est le problème avec vos pieds ? » Pour l’instant ils se reposent tranquillement sur un banc – brûlants, mais reconnaissants pour l’air rafraichissant. L’inconfort va disparaître. C’est la chose incroyable à propos des différents états du corps-esprit : Ils passent. Ils vont, ils viennent. Certains persistent plus longtemps, mais ils changeront à un moment ou à un autre. L’art de vivre consiste à ne pas en faire d’histoires, car les histoires durent plus longtemps que les états qu’elles décrivent. Beaucoup plus longtemps. Parfois des siècles.
Les gens affirment souvent ce que nous lisons dans les textes traditionnels de l’Orient : « Je ne suis pas mon corps. » « Vous n’êtes pas votre corps ! » Il peut être utile d’utiliser ces mots comme un mantra qu’il vaut la peine de se répéter lorsque l’on s’identifie profondément avec « mon » corps qui souffre et que l’on s’inquiète terriblement pour celui-ci. ll peut être utile de remplacer des phrases usées et déprimantes par des mots nouveaux.
Est-ce que cela soulage d’entendre, « Vous n’êtes pas votre corps » ? Jusqu’à un certain point, oui. Mais cela ne mènera pas très loin étant donné qu’il y aura toujours une voix qui répondra immédiatement, « J’ai l’impression que je suis mon corps ! Ce sont « mes » pieds qui sont douloureux, pas les vôtres. J’ai définitivement le sentiment que je suis le propriétaire de ce corps, personne d’autre. »
Alors, que voulons-nous dire par ce « je, » et qu’en est-il de la question de propriété? Sommes-nous prêts à enquêter plus profondément sur la question ? Observer l’état d’esprit, l’ effet des mots sur l’organisme quand nous disons, « j’ai mal, » « c’est mon corps, » « tu me fais mal, » ou lorsque (délibérément au départ) nous laissons tomber ces mots puissants et décrivons simplement ce qui se passe ? Tel que « pour l’instant, la douleur est dans les pieds » ou « cela me fait vraiment mal quand tu dis des choses comme ça. »
Nous pouvons sagement admonester les autres et nous-mêmes : « Ne vous identifiez pas à votre corps. » Mais qu’est-ce que cela signifie ? Essayez de ne pas rester au niveau superficiel des mots, mais demandez-vous quelle est la réalité qu’ils veulent faire ressortir afin que nous puissions nous comprendre plus profondément les uns les autres. Ne vous contentez pas d’accepter ce que Toni est en train de dire. Remettez-le en question. Nous pouvons nous poser la question ensemble.
Extrait de: The Silent Question (La question silencieuse)
Rien de spectaculaire
Il y a le vent, le bruissement des feuilles, la clarté de la pièce, la respiration, la couleur du plancher en bois, les mains qui reposent, le cœur qui bat. Il y a la salive qui s’accumule dans la bouche et le fait de l’avaler. Pourquoi est-il si difficile d’être en contact avec ce qui est réel, ce qui se passe actuellement en ce moment, même si ce n’est pas spectaculaire ?
Est-ce que c’est l’un de nos problèmes ? Que pour être en contact avec la réalité, nous nous attendons à quelque chose de spectaculaire, quelque chose qui sort de l’ordinaire ? Nous ratons alors l’expérience d’être avec nos pieds sur les sols les plus ordinaires, un chemin détrempé, un plancher en bois, un tapis?
La nuit dernière dans la salle de réunion il y avait une lampe sur la table, et juste en dessous une petite plante avec des feuilles vertes, d’un vert inimaginable, comme des langues qui se dérouleraient du petit pot et quelques fleurs rouges, aussi rouges que possible, avec des petits points jaunes à l’intérieur. Aussi simple que ça. Est-ce que nous sommes en mesure de voir ça et de n’avoir aucune attente en retour ? Est-ce que nous pouvons seulement le voir, l’entendre, le sentir complètement ?
Dans le même temps il y a la respiration, le bruit du vent, le tic-tac de l’horloge et le battement du cœur. Il peut également y avoir un sentiment d’incertitude ou de calme. L’univers entier se trouve là – son miracle, pas son concept. Seulement l’air, la terre, le ciel, la nuit, les étoiles et les lumières de Springwater.
Extrait de The Light of Discovery® Traduction Bouddhisme au féminin
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