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Gerta Ital

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« Au Japon ainsi qu’en Allemagne, on m’a souvent demandé : Qu’est-ce qui vous a incité à aller au Japon ? aviez-vous déjà étudié le Bouddhisme Zen ? Que veut dire exactement Zen ? » Et ainsi de suite.

La réponse à des pareilles questions ne pouvait forcément qu’être imparfaite. Pourquoi ? parce qu’il ne peut y avoir qu’une seule réponse véritable à ces questions : la vie vécue de celle qu’on questionnait… Des décennies d’efforts spirituels et physiques ont précédé ce voyage et c’est dans la mesure où ma vie a été remplie par cette religion, c’est-à-dire par ce retour vers Dieu que je vais essayer d’en parler…

C’est en 1951 que le livre du professeur Herrigel : « Le zen dans l’art du tir à l’arc » me tomba entre les mains. Ce livre me bouleversa tellement que je lui écrivis. »

C’est ainsi que Gerta Ital débute le récit de son périple intérieur qui la conduisit de l’Allemagne d’après guerre « vers les derniers Gardiens de la grande tradition Zen, vers le Japon. »

Née en 1904 à Hanovre de parents musiciens, elle reçoit elle-même une formation musicale très poussée et devient une pianiste accomplie, elle est très attirée par le théatre et y fait carrière avec succès quand l’appel spirituel se fait sentir, elle a alors 25 ans. Elle se lance avec ferveur dans une pratique de yoga (nous sommes en 1929, et le yoga n’est pas ce qu’il est devenu de nos jours), elle étudie également l’egyptologie. En 1951, lorsqu’elle s’intéresse au zen, elle a 47 ans.

Avec détermination, elle commence à apprendre le japonais à Berlin, rencontre le Père Lassalle, auteur de l’ouvrage : « Le Zen, chemin vers l’illumination ». Il lui faudra attendre 1963, elle a 59 ans, pour s’envoler vers le Japon, rencontrant aussitôt de sérieux problèmes de santé qui l’affecteront durant tout son séjour.
Le Docteur Susuki, auteur du célèbre ouvrage : Essais sur le bouddhisme zen, alors âgé de 93 ans, la reçoit et l’introduit auprès d’un maître qui l’accepte comme élève. Elle commence la pratique des koans sous sa direction, et, par chance, il parle assez bien anglais pour pouvoir communiquer avec elle.

Elle pratique alors huit heures de zazen par jour.
« Mon dos est comme rompu et mes genoux ne sont que douleur, mais je tiens bon. Grâce à cette persévérance, et sans m’en rendre compte, je m’étais conquis de vive force l’estime de toute le monde. Personne n’avait cru possible que quelqu’un venant d’Occident, une femme de surcroît, fut capable de rester « assise » de la façon réglementaire. »

Après seulement un mois et demi de pratique, elle connait une première expérience d’illumination, ce qui surprend grandement le maitre japonais qui l’a reçu. Un enchaînement de circonstances apparemment inattendues la mènent alors à Kobé, vers celui qu’elle attendait : Roshi Mumon Yamada, regardé au Japon comme le successeur direct de Hakuin et l’un des maitres japonais les plus respectés.
En arrivant au temple, elle reconnait l’escalier dont elle avait rêvé bien des années auparavant, au sommet duquel se tenait une silhouette argentée qui l’encourageait.

En acceptant dans son monastère comme disciple une étrangère, une femme et une laïque de surcroît, Roshi Mumon Yamada brise les tabous de la tradition japonaise d’une façon radicale et déclenche ainsi une tempête de protestations à la fois dans et au dehors du monastère.
Tout en luttant avec sa pratique, Gerta Ital va devoir affronter, outre de pénibles difficultés de santé, des jalousies, des mesquineries et des cabales. Lors de ce premier séjour, elle reste sept mois au Japon, elle y montre un courage incroyable et finit par atteindre un haut degré d’éveil.

Elle conclut son premier ouvrage ainsi :
« Mon propre chemin, que j’ai essayé de décrire, a été très long et très pénible. Mais cela ne devrait décourager personne, car chaque être humain est différent des autres… Il n’y a ni dogme ni rien qui soit capable de vous rendre bienheureux. Il n’existe rien que la Vérité en tant qu’être vivant, et la seule chose à quoi tendent les efforts du Maître, c’est d’éveiller l’élève à la perception de cette Vérité.
La voie est ouverte à chacun(e), quelle que soit sa religion. Mais il doit la suivre. La manière dont il vaincra les diverses difficultés qui se présenteront et la façon dont il s’exercera le mèneront au but, même sans faire de voyage au Japon.. ».

Elle cite le Père Lassalle :
« L’illumination est ouverte à tout le monde, à condition qu’on emprunte le vrai chemin qui y conduit. Par elle-même, l’llumination n’est ni bouddhique, ni chrétienne, ni d’aucune religion particulière. Elle peut être trouvée aussi bien dans l’Islam que dans le Christianisme, même si elle n’est pas recherchée de façon aussi méthodique et spécifique dans ces traditions que dans le Yoga ou le Zen. Théoriquement parlant, l’association avec une religion est secondaire, même s’il est peu probable que quelqu’un sans motivation religieuse ou l’aspiration à réaliser l’Absolu se soumette aux dures épreuves, aux difficultés et au renoncement radical qu’implique ce chemin. »

Et enfin, elle conclut :
« Le chercheur qui a gravi une partie de cette voie et a vécu de nombreuses expériences exaltantes ne connait plus d’arrêt. Non seulement, il doit en donner des preuves dans sa vie extérieure, mais aussi sur la voie de son illumination.
De Grands Maîtres sont allés ainsi d’illumination en illumination, car ce qui a été atteint une fois doit être atteint de nouveau, doit être approfondi, doit être éprouvé et compris en tant qu’un tout complet et une multiplicité infinie, dans un aspect toujours nouveau. »

Après la publication en Allemagne de ce premier ouvrage, elle commence à avoir des élèves. En 1967, elle a alors 63 ans, elle décide de retourner au Japon pour aller encore plus loin dans son cheminement intérieur. Elle y restera à nouveau six mois, elle y affrontera d’autres épreuves très dures, et finira par triompher de tout ce qui l’empêchait d’atteindre son but ultime : un éveil définitif, la libération. Son deuxième ouvrage raconte ce parcours ainsi que des éléments de sa biographie spirituelle antérieurs au monde du Zen. Elle reçoit officiellement la transmission de son maitre avant de rentrer en Allemagne, elle y enseignera jusqu’à sa mort, en 1988, la même année que son maitre, elle avait atteint l’âge de 84 ans.

voir ses ouvrages :
le maitre, les moines et moi
On the way to satori

En relation avec le monde du zen, voir le livre de Sally Tisdale Women of the Way