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Les femmes au coeur des attentions bouddhistes

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La lignée Drukpa a célébré ses 800 ans, en aout 2012, à Plouray (Morbihan). Cette branche du bouddhisme milite pour l’égalité hommes-femmes. Deux nonnes racontent ce bouleversement culturel.
À Plouray, les femmes ont été très présentes lors des cérémonies. Ting Dzin (photo) milite pour l’égalité des sexes.

« L’accès aux enseignements spirituels est très récent pour les femmes. » Nawang Jinpa, nonne bouddhiste française, s’enthousiasme pour ce qu’elle appelle « une révolution » de la place de la femme dans le courant philosophique qu’elle a adopté depuis près de quinze ans : la lignée Drukpa, un bouddhisme ésotérique.

« Malgré les nombreux textes, seuls les enseignements transmis par la parole d’un maître ont valeur d’éveil », précise cette Marseillaise d’origine, crâne rasé, parée d’un kesa bordeaux et orange, l’habit traditionnel des monastiques.

Principalement enseignée dans les pays de la chaîne de l’Himalaya, cette spiritualité laissait peu de place au sexe dit faible. « La place qu’occupent les femmes dans le bouddhisme est issue d’une vision très masculine de la philosophie. Et cela se ressent directement dans la culture de ces régions où les hommes sont plus éduqués. »

Au quotidien, réduites aux corvées, les femmes ont pour habitude de servir les hommes. « Vision caricaturale », rétorque Nawang. Avant de nuancer : « Dans leur famille, les femmes ne sont pas grand-chose. C’est une donnée culturelle qui s’est longtemps ressentie, mais la donne change. »

Par la volonté d’un homme, le Gyalwang Drukpa, chef de la lignée, les femmes ont désormais accès à l’éveil spirituel au même titre que les hommes. Il a fait construire trois « nonneries », équivalent bouddhiste des couvents. Deux en Inde, une au Népal.

Présent pour célébrer les 800 ans de la lignée Drukpa, pendant une semaine, au centre bouddhique morbihanais, « il croit beaucoup en la force spirituelle des femmes », assure Ting Dzin. Originaire de la région du Ladakh, au nord de l’Inde, elle est responsable des enseignements à la nonnerie népalaise.

« Les femmes reçoivent désormais une éducation qu’aucun maître spirituel ne transmettait auparavant. Elles n’étaient pas censées participer au transfert du savoir, détaille Ting Dzin. C’est un changement profond pour les sociétés bouddhistes. »

À tel point que la modernité de celui que toutes appellent « Sa Sainteté » a suscité quelques réticences. «Si les Occidentaux ont applaudi, les Asiatiques ont observé», avant de considérer cela comme « une vraie avancée », explique Nawang Jinpa.

Ting Dzin est le fruit de cette bataille pour l’égalité des sexes. Elle mène des rituels collectifs durant lesquels sa seule voix résonne. Inimaginable il y a encore quelques années, « c’est une grande chance pour moi ». « Et elle le fait parfois mieux que les hommes ! », plaisante son amie française.

Source Ouest France