Dans les articles de ce numéro 3, j’ai trouvé l’interview de la présidente des Sakyadita excellente et j’avais vraiment envie d’aller en Malaisie rencontrer toutes ces femmes formidables. Mais l’envie ne suffit pas, cette fois, ce n’était pas possible ! J’espère bien que ce n’est que partie remise et que la prochaine fois (dans deux ans, si j’ai bien compris), je pourrai y aller et partager avec toutes celles qui lisent ce magazine les trésors que j’y aurai découvert.
En attendant, je rapporte ici quelques lignes de cette interview à l’usage de celles qui ne parlent pas l’anglais :
« Nous voulons (dans cette réunion en Malaisie) faire connaitre les accomplissements des femmes…
Partout où nous avons organisé une conférence, nous avons trouvé que les accomplissements des femmes ont été ignorés. Personne ne remarque ou se soucie réellement de faire connaitre les contributions des femmes bouddhistes… «
Je voudrai faire un bref commentaire sur cela. D’abord, comme nous pouvons le constater chaque jour dans les journaux télévisés et autres médias, ce n’est pas seulement les accomplissements des femmes bouddhistes qui sont ignorés, mais les accomplissements des femmes en général.
Une simple anecdote : Pour couvrir la conférence internationale des femmes à Pékin en 1995, (4000 participantes) honorée de la présence de Madame Clinton, le journal le Monde ne pouvait pas faire moins qu’y envoyer un journaliste, mais pour le mondial de football, le même journal estimait nécessaire de doubler l’effectif ! (voir à ce propos Que reste-t-il de Pékin ? )
On chercherait en vain dans tous les médias la moindre allusion à la dernière réunion des femmes bouddhistes en Malaisie, mais nous venons de voir le déferlement médiatique de la dernière coupe du monde de football.
Même dans Bouddhisme Actualités, il est question du quatrième Sommet mondial du Bouddhisme en Thaïlande mais pas de la rencontre des femmes bouddhistes en Malaisie !!
Que les hommes se passionnent exclusivement pour des histoires d’hommes, c’est une réalité éclatante. Ils s’identifient à ceux dont ils parlent (voir l’inimaginable déification des footballeurs !), ils ne se sentent tout simplement pas concernés par ce que font ou disent les femmes.
Mais les femmes ? c’est à elles que je m’adresse ici. Elles sont tellement conditionnées que la plupart d’entre elles trouvent normal de ne s’intéresser qu’à la vision que les médias, très largement entre des mains masculines, leur offre. Autrement dit, elles sont complètement conditionnées à trouver normal d’ignorer leur propre vie et leurs propres aspirations et celles d’autres femmes.
Un article de Bouddhisme Actualités souligne complètement ce fait. La femme qui a écrit cet article s’émerveille de la venue du Tibet de trente huit enfants, trente huit garçons, qui dit-elle ont échappé à la crasse et à l’ignorance sans à aucun moment noter que, très probablement, autant de fillettes, simplement parce que ce sont des filles dans un univers où leur place n’est pas reconnue, n’auront pas la même chance.
On pourait se dire qu’une femme s’intéresse à ce que font les hommes car elles ont un père, un frère, un fils dont elles suivent les accomplissements avec fierté. Mais n’ont-elles pas une mère, une soeur, une fille ?
Dans l’interview de la Vénérable Karma Lekshe Tsomo, elle souligne combien les femmes doivent prendre confiance en elles-mêmes et cultiver la certitude qu’elles peuvent accomplir de grandes choses.
Recherchons consciemment les accomplissements des femmes et ne laissons pas des mécanismes archaïques nous conditionner et nous diminuer nous-mêmes. C’est pourquoi le magazine me parle beaucoup. Marie-Claude
Bonjour Marie Claude, J’ai trouvé ta réflexion très intéressante, mais je voudrai ajouter quelque chose au sujet de cette question d’intérêt des femmes pour les accomplissements des hommes.
C’est très relatif, je ne crois pas qu’il y ait tant de femmes qui soient passionnées par le football et on ne voit pas beaucoup de femmes qui dévorent le journal sportif l’Equipe.
C’est vrai que les femmes ont facilement leurs « héros » au cinéma ou ailleurs, c’est vrai aussi qu’au cinéma, les réalisateurs masculins sont plutôt intéressés à montrer les fesses des femmes que leurs accomplissements.
C’est vrai qu’il y a des femmes extraordinaires et peu de films qui en parlent, mais les films en général ne parlent pas des accomplissements des gens mais principalement des bagarres, des drames, du sexe, etc.
Il nous faut des metteurs en scène féminines, elles ne sont pas assez nombreuses, et qui en plus aient des choses intéressantes à dire au plan spirituel.
C’est vrai aussi que les femmes regardent les hommes dans leurs accomplissements et pas leurs fesses ; là, il y a un comportement vraiment différent entre femme et homme. Je crois que les femmes inconsciemment évaluent la capacité de l’homme en tant que soutien de famille, d’où admiration, recherche du héros solide, etc. tandis que les hommes jaugent l’aspect physique de la femme d’abord.
Bien sûr qu’il faut aller au delà de ce genre de comportement, mais c’est là, en soi, et ça doit jouer même dans le regard que l’on porte sur un enseignant spirituel.
Et justement, en tant que femme, est-ce que j’accorde autant de confiance à une femme qui enseigne qu’à un homme ? je ne parle pas de Tenzin Palmo, mais d’une nonne lambda face à un moine lambda ? Est-ce que inconsciemment je ne suis pas conditionnée par cette image de l’homme qui sait ?
Dans le passé, on n’envisageait même pas une femme médecin, ni chirurgien, les choses évoluent, mais je suis d’accord, on doit être soi-même ultra vigilante pour ne pas se laisser piéger dans des comportements qui nuisent à toutes les femmes. Nadine.