Je suis pratiquante dans la tradition du bouddhisme tibétain et je dois constater qu’à part le Bouddha bien sûr, ce sont toujours Padmasambhava, Milarepa et d’autres grands maitres tibétains qui sont cités. Je ne me souviens pas d’avoir jamais entendu parler de Machig Lapdron, de Ayu Khadro, de Tenzin Palmo.
Ce n’est pas un hasard, c’est une constante de l’histoire de l’humanité, les accomplissements des femmes ne sont pas transmis puisque la parole est toujours prise par les hommes qui considèrent toujours, avec le plus parfait naturel, que les accomplissements, les réflexions, les enseignements des hommes sont toujours plus intéressants et seuls valables à transmettre. C’est bien de cela dont Tenzin Palmo veut parler quand elle parle de l’ego masculin.
La certitude que l’accomplissement (de quelque ordre qu’il soit) est nécessairement masculin est tellement ancré dans l’inconscient des hommes — et par conséquent dans l’inconscient collectif vu qu’ils sont les seuls auteurs de tous les écrits sacrés depuis que l’écriture existe — que les accomplissements des femmes ne sont pas transmis par la mémoire collective. C’est aux femmes de transmettre aux autres femmes les accomplissements spirituels remarquables des plus grandes de leurs mères et sœurs spirituelles, c’est pour cela que je suis particulièrement touchée par Bouddhisme au féminin. Le conditionnement du patriarcat est si ancré que beaucoup de femmes le subissent sans en être conscientes, et sans voir qu’elles n’ont comme références spirituelles (philosophiques, artistiques, scientifiques) que des hommes.
Le bouddhisme insiste suffisamment sur le rôle tout puissant du mental pour comprendre que les femmes se retrouvent forcément handicapées dans leurs efforts par le doute sur leurs capacités qui leur est distillé dans les écrits ou les paroles des moines.
Comment peut-on se construire de façon positive sans référent ? même sans y prendre garde, beaucoup de pratiquantes ont inconsciemment l’idée que l’accomplissement suprême n’est pas pour elles, et c’est certainement la meilleur manière pour elles de ne jamais y parvenir !
Il y a chez nombre de femmes une souffrance qui n’est pas toujours consciente ; il suffit de voir le nombre de livres publiés sur la place des femmes dans l’Eglise, les femmes et l’Islam, les femmes et la religion, eh bien, je pense qu’il y a beaucoup à dire sur les femmes et le bouddhisme. Annelise, Belgique