Suzanne Gros naît en 1878 à Laon, dans l’Aisne, dans une famille bourgeoise. Après son mariage avec Henri Pertat, elle déménage en 1897 à Paris où elle entame en 1905 des études de médecine avec le soutien de son mari, lui-même médecin. En 1908, elle est nommée externe des hôpitaux de Paris dans le service du professeur Morestin, pionnier de la chirurgie maxillo-faciale, puis prolonge cette expérience en entrant en 1909 dans le service de dermatologie du professeur Brocq à l’hôpital Saint-Louis. Reçue à l’internat en 1912, 4e à l’écrit et 1re à l’oral, elle approfondit ses connaissances dans le domaine de la chirurgie maxillo-faciale ; elle est notamment amenée à soigner la comédienne Sarah Bernhardt à la suite d’un lifting pratiqué aux États-Unis ayant abouti à un demi-échec.
Son action durant la Première Guerre mondiale
À l’entrée de la guerre en 1914, sans avoir pu soutenir sa thèse de doctorat, comme tous les internes, Suzanne Gros est autorisée à exercer la médecine en ville. Elle rejoint alors le professeur Morestin à l’hôpital militaire du Val-de-Grâce. En 1916, elle se forme aux techniques de la chirurgie réparatrice et correctrice. Son mari meurt à la guerre. Elle doit faire vivre sa fille et sa mère réfugiée et exerce la médecine dans de terribles conditions matérielles. Tandis que les blessés de la face se multiplient, elle se dépense sans compter.
Son action durant la période d’Entre-deux-guerres
En 1919 elle se marie avec le docteur André Noël. En janvier 1922 la grippe espagnole emporte leur fille unique ; son mari se suicide deux ans plus tard.
Impliquée dans la cause des femmes, elle organise en 1923 une manifestation pour appeler les femmes qui travaillent à ne pas payer d’impôts puisque l’état ne leur reconnaît aucun droit.
À 48 ans, en 1925, elle décide de passer sa thèse de médecine, dont elle avait été dispensée à cause de la guerre. Elle étend ses activités de chirurgie, jusque-là confinées au visage, aux autres parties du corps (remodelage des seins, des fesses, des cuisses, dégraissage de l’abdomen et des jambes), ce qui l’amène à inventer des techniques (dégraissage par aspiration) et des instruments (craniomètre, gabarits) encore utilisées aujourd’hui.
Dès lors, on dit de Suzanne Noël qu’elle est« deux fois folle ». D’abord parce qu’elle se spécialise dans la chirurgie plastique, et ensuite parce qu’elle s’engage entre autres, pour le droit de vote des femmes.
Elle est alors contactée par deux femmes américaines fondatrices d’un club féminin: les Soroptimist L’idée d’une union féminine professionnelle lui plaît.
En 1924, elle fonde le premier club Soroptimist français (et en 1926 en Europe) qui défend les droits des femmes.
Parallèlement, elle se consacre pendant 10 ans à la chirurgie. Elle contribue à développer des techniques de reconstruction qui pourront s’appliquer à des cas de mutilations sévères, puis à la réduction d’anomalies physiques.
En 1928, elle reçoit la Légion d’Honneur et la Reconnaissance de la Nation, pour sa contribution à la notoriété scientifique de la France sur la scène internationale.
Au printemps 1936, Suzanne Noël perd la vue durant plusieurs mois. Elle est opérée mais elle réalise qu’elle ne peut plus exercer au même rythme qu’avant. Elle se consacre alors au club des Soroptimist et voyage à travers le monde pour ouvrir de nouvelles antennes, tout en donnant des conférences sur sa pratique de la chirurgie esthétique. Personnalité internationale de premier plan, elle fonde successivement les clubs Soroptimist de La Haye, Amsterdam, Vienne, Berlin, Anvers, Genève, les clubs baltes, ceux d’Oslo, Budapest, et même ceux de Pékin et Tokyo..
Son action durant la Seconde Guerre mondiale
Pendant la guerre de 1939-1945 elle modifie les visages des résistants ou de juifs recherchés par la Gestapo. À la libération, elle intervient pour effacer les séquelles physiques des déportés des camps de concentration nazis.
L’apport technique de Suzanne Noël est particulièrement innovant. Après la Seconde Guerre mondiale, elle se rend dans de nombreux pays pour promouvoir ses idées. Elle a été une ambassadrice unique de la chirurgie plastique et du féminisme à travers le monde.
Lors de ses conférences largement suivies, elle sait partager son savoir et sa volonté d’émancipation des femmes. À ce titre elle a fait beaucoup d’émules aussi bien sur des sujets techniques (chirurgie plastique) que féministes.
Le Soroptimist International existe aujourd’hui dans 123 pays et est représenté par 96.000 membres dont 119 clubs en France et plus de 2.700 membres.
En 1946, les Soroptimist organisent une réception pour les délégués aux conférences des Nations Unies, qui comprenait Eleanor Roosevelt, et en 1948, l’Association Soroptimist International obtient le statut consultatif auprès de l’UNESCO. L’Association a également reçu le statut consultatif auprès de l’ECOSOC (Conseil économique et social des Nations Unies) en 1950, auprès de l’UNICEF en 1966.
Cette pionnière de la chirurgie réparatrice et esthétique est morte en 1954, ayant marqué l’histoire des sciences comme étant la première femme à exceller dans ce domaine. Les chartes des nouveaux clubs Soroptimist sont remises au nom de Suzanne Noël et une bourse portant son nom est instituée pour aider une femme médecin à se spécialiser en chirurgie plastique.
Tous les deux ans, à l’occasion du SI/DAY (célébré le 10 décembre), la Présidente du Soroptimist International lance un appel soutenu par les Soroptimist du monde entier, destiné à améliorer la vie des femmes et des filles à travers le monde.
Sources : Femmes Ici et ailleurs, wikipedia, « 3 Hauts de France » et Soroptimist International