Pourquoi imaginer une école bouddhiste ? nous y voyons au moins trois raisons.
D’abord, si le bouddhisme est important pour nous, n’est-il pas des plus naturels que nous souhaitions que nos enfants, au delà du cadre familial, soient en contact avec les valeurs essentielles qui fondent notre vie?
Et cela nous amène à la deuxième raison, une école bouddhiste, c’est retrouver une communauté d’enfants et de parents qui partagent les mêmes aspirations spirituelles.
La troisième raison, c’est l’importance, soulignée sans cesse dans le bouddhisme, du conditionnement. Les enfants sont de véritables éponges, ils s’imbibent de tout, en bien comme en mal, une école bouddhiste, c’est tenter de les préserver, dans une certaine mesure au moins, de l’attitude matérialiste et consumériste qui caractérise notre époque sans oublier la violence qui ne cesse de se répandre dans la société et par conséquent dans les écoles.
Une autre raison enfin c’est que le bouddhisme, pour s’implanter durablement en Occident, doit prendre racine ici et donc se transmettre à la prochaine génération.
Christina Feldman, enseignante de Vipassana en Angleterre et aux Etats Unis déplore que « Certains enfants n’ont aucune dimension spirituelle dans leur vie. Leurs parents appartiennent à une génération qui a souvent renoncé à la religion traditionnelle et ne va plus à l’église ; de ce fait, les enfants n’ont pas de symboles spirituels appartenant à leur culture. En Amérique, il est illégal de faire de l’éducation religieuse à l’école. On propose aux enfants les symboles de consommation, de plaisir et de déplaisir. Le Bouddhisme en Occident doit combler ce fossé et contribuer à élever une nouvelle génération de personnes ayant une conscience spirituelle. » (Rencontre avec des femmes remarquables p.209)
Etant elle-même mère de deux enfants, elle dirige des retraites familiales (parents et enfants) depuis dix ans. Elle ajoute: « Mon rôle dans la vie n’est pas de modeler mes enfants dans une forme particulière de pratique du Dharma. Pourtant il est inévitable que les parents influencent leurs enfants par leurs actions, leur exemple et leurs paroles. Il est important que mon influence sur mes enfants soient utile, entière et qu’elle les encourage à se poser des questions et à comprendre. Je préconise pour les enfants la base morale du Dharma, les préceptes. Ils font partie de la vie de mes enfants depuis qu’ils sont en âge de comprendre les mots ».
Elle constate qu’« On a toujours considéré dans l’enseignement occidental de la méditation que le cheminement spirituel était le domaine des adultes, et on s’adressait rarement à celui des enfants. C’était comme si les enfants n’avaient pas de dimension ou de besoins spirituels. On attendait d’eux qu’ils fassent les erreurs qu’ils devaient faire, qu’ils collectionnent les problèmes insolubles autant qu’ils le devaient, et puis qu’ils aillent faire une retraite pour tout résoudre quand ils seraient plus âgés… J’ai découvert en travaillant avec les enfants, notamment avec ceux qui ont participé à plusieurs retraites qu’ils ont une volonté, une ouverture et un intérêt étonnants pour l’étude du Dharma. »
Ainsi, nous le voyons, contrairement aux idées reçues que l’on peut avoir sur la spiritualité comme étant une matière trop sérieuse pour les enfants, il est tout à fait possible de leur communiquer, même très jeunes, une approche différente de la vie, des relations aux autres et à soi-même.
Nous vous proposons de découvrir un très bel article, la non violence avec les tout- petits d’une institutrice québecoise paru dans la revue belge Ici et Maintenant qui diffuse l’enseignement de Thich Nat Han.
Voir ici une école bouddhiste en Angleterre
Au plan pratique, il existe en France,au sein de l’éducation nationale, des écoles privées, confessionnelles ou non, voir leur statut . Rien ne s’oppose à l’établissement d’écoles bouddhistes. Cela signifie qu’il serait théoriquement possible, au même titre que les écoles chrétiennes, de voir des écoles dirigées par des laïques, mais aussi par des nonnes et/ou des moines bouddhistes.
Cependant, la communauté bouddhiste est loin d’être homogène, chaque « véhicule » et, à l’intérieur d’un véhicule, chaque école et chaque centre réunissent des congrégations se composant de quelques dizaines à quelques milliers de pratiquants. Cela rend difficile la mobilisation de moyens permettant la création d’écoles confessionnelles sur le type des écoles chrétiennes.
Il est néanmoins possible d’imaginer autour des plus grands centres des écoles privées sur le modèle des écoles Steiner, Montessori ou d’autres écoles alternatives.
Comment imaginer une école bouddhiste ? Bien évidemment, il ne peut s’agir d’écoles du type tibétain telles qu’existant dans le Nord de l’Inde et qui sont dans un contexte culturel totalement différent. En France, une école confessionnelle en contrat avec l’état doit suivre le programme ‘officiel’ et enseigner aussi les matières « profanes ».
Pour ce qui est du Dharma, il s’agirait avant tout de communiquer aux enfants et aux adolescents un état d’esprit et des valeurs. On le voit par l’expérience de Christina Feldman et dans l’exemple quebécois, il est possible de donner aux enfants, même très jeunes, des modèles de comportement qui seront d’une grande aide pour eux dans le futur. Il est même possible de leur enseigner la méditation à un âge encore tendre.
Pour les personnes qui ne peuvent compter sur une communauté forte, il faut rappeler qu’il leur est possible et légal d’enseigner elles-mêmes à leurs enfants, à condition de soumettre périodiquement les enfants à un contrôle de connaissances par l’éducation nationale.
Il est aussi possible d’inscrire des enfants à une école par correspondance, (le CNED).
On peut imaginer un groupe de parents suivant le même enseignement se relayer auprès de leurs enfants pour surveiller les cours et organiser des moments de partage spirituel avec un(e) enseignant(e) laïc(que) ou non.
On peut aussi penser plus ponctuellement à des camps de jeunes pendant les vacances comme ceux qui sont organisés chez le maître vietnamien Thich Nat Han qui a toujours mis l’accent sur l’importance de la participation des enfants dans les séjours d’été organisés au Village des Pruniers.
On peut encore imaginer dans des lycées ou collèges où existent des aumoneries, la possibilité de partage du lieu chrétien pour un moment hebdomadaire de recueillement et de méditation silencieuse offert aux adolescent(e)s.
Les réunions de parents d’élèves peuvent être aussi un lieu de parole avec les enseignants à propos de ce que l’on souhaite développer comme comportements bénéfiques chez les enfants.
Nous n’avons évidemment pas de solutions toutes faites, mais ces quelques pistes de réflexions pourront, nous l’espérons, être une aide pour celles qui souhaitent donner à leurs enfants un support spirituel qui leur sera une protection et une aide pour le futur.
Pour terminer, quelques articles autour de l’école:
Entretien avec lama Khédroup, mère et grand-mère.
Rencontre avec Anne, maman de Joseph, 6 ans, et pratiquante bouddhiste
Une éducation boudhiste en thaïlande
La violence à l’école, de quoi parlons-nous ?
Prévenir les violences à l’école
et aussi quelques liens :
Les outils de la non violence à l’école